Qu'est ce que je peux lire comme billets sur ces petites phrases toutes faites, classiques, plutôt gentilles, qu'on dit presque machinalement! Sur les remarques pendant la grossesse! Sur les conseils d'après la naissance! Je vais m'adresse ici aux auteurs de ces billets.
Souvent, elles t'énervent, et tu laisses libre cours à tes pensées et critiques sur ton blog et ailleurs (pas vrai, Mère Cane? ).
Moi, ça me laisse perplexe. En général, en lâche consensuelle que je suis, je ne commente pas, ou alors juste un petit mot dans lequel je n'entre pas dans une polémique. Je me demande toujours, pourtant, pourquoi tant de haine? Mais aujourd'hui, j'ai quand même envie de dire ce que je pense, moi aussi.
Dans le top des phrases et remarques insupportées:
- Alors, quand est-ce que vous nous faites un petit deuxième?
Je vais faire ma prof, et t'analyser le truc: tout d'abord sur la légitimité du peuple à poser cette question. Il est courant, voire fréquent, que les gens aient des enfants. Un, deux, trois, et plus. Quant un couple n'a pas d'enfants, on peut logiquement se demander s'il compte en faire, et s'il en a un , s'il compte en faire un autre. Cas de figure classique, quoi.
Deux possibilités: soit le quidam curieux s'en fout en fait de la réponse. Il est conscient qu'en société, il est de bon ton de s'intéresser à la vie des gens, donc il pioche dans l'arsenal des questions de base et en sort une adaptée à la situation. Pourquoi donc mal le prendre? Il suffit de lui donner une réponse socialement adaptée: "On y pense", ou "Pas tout de suite, on attend un peu", ou encore: "On verra plus tard". Car il n'y a aucune mauvaise intention chez le quidam qui veut juste se montrer poli.
Soit le quidam est proche de toi et s'y intéresse vraiment. Eh bien, en quoi c'est mal? Cette personne s'intéresse à toi et à ta vie, rien de mal. Tu peux soit lui répondre "pour de vrai" si le coeur t'en dit, car on aime bien papoter aussi, non?
Sinon tu lui sors une des réponses citées dans le cas précédent.
Pourquoi mal prendre cette question? Soit tu n'aimes pas les questions ingérantes, mais ma grande je suis désolée, on vit en société, il va falloir t'y faire.
Sinon on ne se pose plus du tout de questions, et le moindre "ça va?" peut être source d'énervement: "pourquoi il veut savoir si je vais bien, celui-là???!!! D'abord je vais TRES mal et je n'ai pas envie d'en parler, ni de raconter ma vie, quel con ce mec!!!".
Soit tu galères pour le faire, ce deuxième, et tu n'as pas envie que tout le monde te le rappelle tout le temps. Certes. Ce fut mon cas (tu peux le lire ici si le coeur t'en dit). Cependant le quidam ne le sait pas. S'il le savait, sache qu'il ne commettrais pas cette maladresse, à moins d'être sadique, ce qui n'est pas le cas du quidam moyen. Et alors, évite de fréquenter ce type.
Il m'est arrivé, peu de temps après ma première fausse-couche, qu'on me demande si l'homme et moi voulions des enfants. Une copine que j'aime beaucoup et que je n'avais pas vue depuis quelques mois. Évidemment ça m'a fait mal, ça m'a fait repenser à mes déboires. Mais la douleur, elle était là, de toutes façons et ça n'était en rien sa faute. Et je lui en ai parlé. Et au final, ça m'a fait du bien. Elle a été touchée de mon histoire, elle s'est excusée et je l'ai excusée. Comment aurait-elle pu savoir? Et aucune mauvaise curiosité dans sa question, juste de l'intérêt.
Une autre possibilité encore, et qui est légitimement énervante: la question posée et reposée sans cesse. Là, c'est simple: c'est ta mère ou ta belle-mère qui pose la question. Et la question n'est pas en cause: elle te fera chier avec d'autres. Si tu fais le deuxième, elle te cassera les pieds sur l'allaitement, sur la propreté de ta maison, sur...alouette! Le problème c'est l'ingérence réelle cette fois, de gens qui voudraient que tu mènes ta vie comme eux pensent qu'il faudrait que tu la mènes. Donc cette pauvre question-là n'a rien à voir avec tes problèmes familiaux. Il te reste à t'écraser ou à la remballer, ta mère.
-Oh, il se porte bien!
Ton bébé est un gros bébé. Ca t'inquiète. Le pédiatre te fait flipper en t'accusant de le gaver de saindoux, et te promets les foudres de l'obésité pour son adolescence. Tu es donc à cran sur le sujet. Ce n'est pas la faute du quidam. Le quidam fait une remarque qui se veut gentille, sache-le. Car un beau bébé joufflu, c'est mignon. Si si, c'est mignon! Donc le quidam se veut amical. Il n'imagine pas une seconde que ça peut être un souci, et plus le quidam affiche d'années au compteur, plus c'est vrai.
Le problème ici, ce sont TES angoisses, l'intention du quidam étant comme précédemment de faire montre d'intérêt, feint ou réel.
J'ai un Cromignon joufflu, mais pas "gros". Les marques d'intérêt de ce type ne me blessent pas, et même me font plaisir, comme toutes les marques d'intérêt à mon égard en général.
Ne demande pas au quidam de savoir que ton bébé n'est pas juste joufflu mais en dehors de la courbe de croissance.
-C'est pour quand ce bébé?
Tu es enceinte. (Sinon je comprends que cette question t'énerve). C'est en général une période particulière, et le quidam s'y intéresse. Tu as des caisses prioritaires et des places assises dans les transports (sisisisi on y croit!). Les gens te sourient plus qu'en temps normal.
Ton corps est en mode linéaire, et prépare l'arrivée d'un nouveau petit humain parmi nous. Le quidam qui veut se montrer social te demande donc quand est-ce-que cette préparation sera aboutie.
Quand tu répares ta bagnole, tu ne vas pas t'énerver si ton boulanger te demande si c'est long et galère, si? Pareil ici.
Le quidam s'intéresse, il n'a vraiment aucune mauvaise intention. Préférerais-tu qu'à l'annonce de ta grossesse on ne s'y intéresse pas?
Que souhaiterais-tu qu'on te dise, alors?
"Je suis enceinte". "Ah, chouette". Et hop on passe à autre chose?
Dans ce cas ma chère, tu serais énervée aussi, du manque d'intérêt face à cette grande nouvelle! Alors que peux-on te dire pour ne pas éveiller tes foudres?
Car c'est valable pour toutes les questions autour de la grossesse: "C'est un garçon ou une fille?" "Ca va tu n'es pas trop malade?" "Tu n'as pas de contractions, tout va bien?" etc...Parfois perçues comme invasives, ces questions sont juste la marque que nous vivons dans une société qui fait une place particulière à la maternité, et c'est très bien!
Préférerais-tu qu'on ignore ta grossesse, que personne ne t'en parle?
Bien sûr, il y en a d'autres,des questions anodines qui deviennent affaires d'état. Pourtant, point n'est besoin d'en faire tout un foin!
Si tu préfères que personne ne s'intéresse à toi, que personne ne te pose de questions, tu peux aussi cesser de vivre parmi les hommes, tu seras bien tranquille, c'est sûr! Sinon, dans notre société, c'est comme ça que ça se passe. Et moi, je préfère!
C'est mon pavé du jour, pour la Mère Cane!